BARCELONE, ESPAGNE—Aucun pays du bassin méditerranéen ne satisfait les deux critères minimaux pour un développement durable: assurer le bien-être de tous dans la mesure des capacités écologiques de la planète, selon l’analyse qui sera présentée à la conférence SwitchMed Connect le 29 octobre par le think-tank Global Footprint Network.
Le premier critère est défini par l’Indice de Développement Humain (IDH) des Nations Unies, qui évalue le niveau de bien-être des populations pays par pays. Global Footprint Network calcule le second critère en mesurant la consommation de ressources naturelles et de services écologiques par une population donnée.
L’analyse de Global Footprint Network, intitulée “Les pays méditerranéens peuvent-ils prospérer si les ressources viennent à manquer?”, démontre que les pays du bassin méditerranéen utilisent actuellement 2 fois et demie plus de ressources naturelles et services écologiques que ce que leurs écosystèmes ne peuvent fournir. Cependant, une amélioration de la qualité de vie a été enregistrée dans la majorité de ces pays ces dernières années, selon les données de l’IDH.
L’analyse, réalisée grâce au soutien de la Fondation MAVA et du bureau de l’UNESCO à Venise pour la science en Europe, révèle que l’intensification des régimes alimentaires en protéines animales est un facteur important de l’augmentation de l’empreinte écologique de la région. L’analyse effectuée sur 12 villes de la région montre aussi que le logement et les transports en milieu urbain peuvent offrir d’importantes opportunités de réduire l’empreinte écologique.
« A la suite de l’adoption des 17 Objectifs de développement durables par les Nations Unies le mois dernier, il est encourageant de constater que le développement humain a progressé dans tous les pays méditerranéens, » déclare Alessandro Galli, directeur de la recherche du programme Méditerranée pour Global Footprint Network. « Ceci étant dit, satisfaire pleinement la vision de la Stratégie Méditerranéenne pour le Développement Durable—assurer un niveau de vie élevé sans dégrader les actifs écologiques—requiert la prise en compte rigoureuse des limites environnementales à tous les niveaux de décision. »
« La bonne nouvelle est qu’en ciblant l’alimentation, le logement et les transports, les pays méditerranéens peuvent trouver de nombreuses opportunités pour mieux gérer leurs ressources de manière durable et développer des économies plus résilientes, » ajoute Galli.
Galli sera co-modérateur d’une session sur l’alimentation durable à SwitchMed Connect le 29 octobre à 10 heures 30 CET. Le rapport d’analyse sur le bassin méditerranéen est disponible en Français, en Arabe et en Anglais.
Développement durable
L’Indice de Développement Humain (IDH) des Nations Unies mesure le niveau de développement d’une nation sur la base de l’espérance de vie, de l’éducation et du revenu moyen des habitants. Sur une échelle de 0 à 1, le Programme de Développement des Nations Unies (UNDP) définit 0,7 comme étant le seuil d’un niveau élevé de développement (0,8 pour un très haut niveau de développement). Depuis 2000, la plupart des pays du bassin méditerranéen ont franchi ce seuil. Seuls le Maroc et l’Egypte affichent actuellement des scores inférieurs à 0,7 (même si ceux-ci progressent).
L’empreinte écologique détermine si une population « Vit selon les capacités de la nature ». Celle-ci mesure les actifs écologiques nécessaires pour produire les services et ressources naturelles consommés par une population donnée (aliments d’origine végétale et produits à base de fibre, bétail et poisson, bois et autres produits forestiers, espace nécessaire aux infrastructures urbaines, forêts pour absorber les émissions de dioxyde de carbone provenant des combustibles fossiles).
Compte tenu des niveaux de population actuels, notre planète est capable d’offrir seulement 1,8 hectare global de surface bioproductive par personne. Ainsi, même si les ressources nationales varient fortement d’un pays à l’autre, il est nécessaire que l’empreinte écologique moyenne par personne à l’échelle mondiale passe largement en-deçà de ce seuil afin de prendre en compte la croissance démographique et les espaces nécessaires à la vie sauvage. Or la majorité des pays méditerranéens (hormis le Maroc, la Palestine et la Syrie) affichent une empreinte écologique supérieure à 1.8 hag.
Empreinte Écologique de la Consommation Alimentaire
L’empreinte écologique de la Consommation Alimentaire moyenne d’un résident Méditerranéen est d’environ 0,9 hag—sur une fourchette comprise entre 0,6 et 1,5 hag. Une valeur supérieure à celle de pays comme l’Inde (0,4), la Chine (0,5), le Costa Rica (0,6) et l’Allemagne (0,8).
Les facteurs qui expliquent le niveau relativement élevé de l’empreinte écologique de la Consommation Alimentaire dans le bassin méditerranéen incluent la sècheresse, la faiblesse relative de la productivité agricole, la dépendance croissante aux produits alimentaires importés et l’abandon progressif du régime alimentaire méditerranéen traditionnel—pourtant bon pour la santé et pour l’environnement. Les céréales, légumes et huiles caractéristiques du régime méditerranéen, dont l’empreinte écologique est relativement modeste, sont remplacés par une nourriture à forte teneur en protéines animales (viande et produits laitiers) avec une empreinte écologique plus élevée puisque ces protéines nécessitent davantage de terres bioproductives pour produire la même quantité de calories que les aliments d’origine végétale.
L’amélioration de la productivité agricole, la réduction des déchets alimentaires et la promotion de régimes alimentaires plus sains et moins intensifs en ressources représentent donc des opportunités pour la réduction de l’empreinte écologique dans la région.
L’Empreinte des Villes
Le rapport comprend aussi une analyse des empreintes écologiques de 12 villes : Barcelone et Valence en Espagne ; Gènes, Naples, Palerme et Rome en Italie ; Tunis en Tunisie ; Athènes et Thessalonique en Grèce ; Antalya et Izmir en Turquie ; Le Caire en Egypte.
Pour plusieurs pays de la région méditerranéenne, un ou deux centres urbains pèsent de façon prépondérante dans l’empreinte écologique nationale. Les résultats de l’analyse démontrent que:
- La ville méditerranéenne avec l’empreinte écologique totale la plus élevée est Le Caire, devant Barcelone et Rome.
- Les villes méditerranéennes avec les empreintes écologiques par personne les plus élevées sont Gènes, Athènes et Rome (dans l’ordre).
- Les villes méditerranéennes avec les empreintes écologiques par personne les plus modestes sont Antalya, Le Caire et Izmir (dans l’ordre).
- La demande en ressources naturelles d’Athènes, qui représente un tiers de la population nationale, dépasse de 22% la capacité écologique de toute la Grèce.
- Les habitants du Caire, qui représentent 16% de la population égyptienne, consomment environ 85% de la capacité écologique du pays.
- Les transports sont le facteur dominant de l’empreinte écologique d’Athènes, puisqu’ils représentent 36% de l’empreinte écologique nationale. A elles-seules, les politiques municipales des transports pourraient donc conduire à une réduction notable de l’empreinte écologique de la Grèce.
« Les villes sont des centres débordants d’activité qui nous permettent d’optimiser l’usage des ressources grâce aux politiques appropriées de logement, de transport et de gestion énergétique, » indique Galli. « Les villes fonctionnent cependant aussi comme un ascenseur social permettant aux habitants d’améliorer leur qualité de vie et donc d’accroître leur consommation. La dynamique entre ces deux tendances doit être pleinement comprise et prise en compte afin que les municipalités deviennent des moteurs de progrès, plutôt que des obstacles, sur le chemin du développement durable. »
Ressources complémentaires :
Accédez directement au rapport ici : Français, en Arabe et Anglais.
Calculez votre empreinte écologique personnelle, et apprenez comment la réduire, en vous rendant sur : www.footprintnetwork.org/resources/footprint-calculator/.
Téléchargez le fichier gratuit qui comprend les données de l’empreinte écologique détaillée de 182 pays: www.footprintnetwork.org/licenses/public-data-package-free-edition/.
A propos de Global Footprint Network :
Global Footprint Network est un think-tank international qui coordonne la recherche et fournit aux décideurs un éventail d’outils pour aider l’économie à opérer dans les limites écologiques de la planète.